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Droit et politique togolais

Enjeux des élections présidentielles en Afrique en 2020 : Continuité, alternance, incertitude,...

10 Janvier 2020 , Rédigé par Zeus Dodji AKPATCHA Publié dans #Elections

Sept États africains seront concernés par des élections présidentielles en Afrique en 2020. Il s'agit de cinq (5) États francophones (Togo, Burundi, Guinée, Côte d'Ivoire et Niger) et deux anglophones ( Tanzanie, Ghana). L'Afrique de l'Ouest et la CEDEAO seront particulièrement concernées ( Togo, Guinée, Côte d'Ivoire, Ghana et Niger). Il ne s'agit ici que des élections déjà programmées, étant attendu que des circonstances exceptionnelles de vacance du pouvoir pourront déboucher sur des élections présidentielles dans d'autres États au cours de l'année 2020. A l'heure des vœux tous azimuts pour la nouvelle année et eu égard aux précédents électoraux en Afrique, il ne serait pas superflu de souhaiter une bonne année électorale à tous ces Etats. Un tour d'horizon de l'élection de chacun de ces États permet de relever une diversité d'enjeux électoraux qui leur sont propres.

 

TOGO :

Faure Gnassingbé tranquille, l’alternance n’est pas pour 2020

 

Le Togo donnera le ton du marathon électoral africain de 2020 avec le premier tour de l’élection présidentielle fixée au 22 février. Il s’agira de la septième élection présidentielle organisée dans ce pays depuis la restauration du multipartisme en 1990 et l’adoption de la Constitution de la IVe République le 14 octobre 1992. Si le Togo

peut se targuer aujourd’hui d’être l’un des rares Etats d’Afrique noire francophone à ne pas avoir connu de dévolution anticonstitutionnelle du pouvoir dans le nouveau constitutionnalisme africain, hormis l'éphémère épisode rocambolesque de l'intérim en 2005, il n’en demeure pas moins qu’il porte aussi l’étiquette peu glorieuse du seul Etat d’Afrique de l’Ouest à ne pas avoir connu d’alternance démocratique durant la même période. Au regard des forces en présence et des conditions d’organisation du scrutin à venir, tout porte à croire que l’heure ne sera pas à l’alternance. Au pouvoir depuis 2005, après avoir succédé à son père Gnassingbé Eyadéma, Faure Gnassingbé, 53 ans, réélu en 2010 et 2015, à l’époque dans un scrutin à tour unique, semble bien parti pour perpétuer la dynastie des Gnassingbé sur le Togo. Coïncidence ou pas, le président a le même âge, à quelques mois près, que cette dynastie inaugurée par son père en avril 1967. Désordonnée, mal préparée et en manque de stratégie, l’opposition, qui continue de fantasmer sur l’alternance, ne semble pas armé pour contester cette hégémonie en 2020. La restauration du scrutin à deux tours par la réforme constitutionnelle du 15 mai 2019 n’y changera rien puisque le candidat du parti au pouvoir n’a jamais obtenu en dessous de 50% lors d’une élection présidentielle au Togo. L’affaire risque d’être pliée pour le président sortant dès le premier tour du 22 février. En bref, ce sera un nouveau rendez-vous manqué avec l’alternance au Togo…

 

BURUNDI :

N’kuruziza tiendra-t-il parole ?

 

Cinq ans après sa réélection controversée de 2015, Pierre Nkuriziza, président depuis 2005 s’est déclaré non partant pour sa succession. Malgré que la nouvelle Constitution adoptée en 2018 ne l’y empêche pas, le président burundais a annoncé courant 2019 qu’il ne se représenterait pas à l’élection présidentielle du 20 mai 2020. Une façon pour lui de restaurer son image un peu ternie par son coup de force électoral de 2015 et de partir par la grande porte en évitant des lendemains sombres à ce pays qu’il a réussi à stabiliser après plusieurs années de guerre civile. Cependant, l’opposition reste mesurée et prudente en espérant que le président tienne parole, ce qui n’est pas la panacée des présidents africains. Toutefois, on peut espérer que la reddition président sortant, si elle se confirme, ouvrira la voie à l’alternance au Burundi et apaise les tensions dans ce pays qui ne veut pas revivre les affres d’un passé très douloureux.

 

L’élection du président a lieu à l’issue d’un scrutin majoritaire à deux tours pour un mandat de sept (ans) renouvelable une fois. L’élection présidentielle du 20 mai 2020 sera couplée avec les élections législatives et municipales

 

 

 

GUINÉE :

A quoi joue Alpha Condé ?

 

Les guinéens seront convoqués aux urnes en octobre 2020 pour désigner le successeur d’Alpha Condé, au pouvoir depuis 2010 et réélu en 2015. Mais l’enjeu principal de ce scrutin réside dans les intentions du président sortant. Alors qu’il ne devrait plus se présenter conformément à l’article 47 al. 3 de la Constitution de 2010 qui dispose qu’« en aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels, consécutifs ou non », l’ex-opposant historique à la dictature de Lansana Conté semble décider à céder à la tentation d’un troisième mandat.

Pour ce faire, il prévoit de faire amender la Constitution pour faire sauter le verrou de la limitation du mandat présidentiel. N’est-ce-pas gênant pour celui qui a été pendant longtemps le chantre de l’alternance et de la démocratie en Guinée ? A 82 ans, ne serait-ce pas plus digne et censé pour lui prendre sa retraite en renonçant aux velléités d’un troisième mandat ? Tout compte fait, les premiers mois de l’année 2020 marquées notamment par les élections législatives, permettront d’en savoir davantage sur les intentions du président guinéen.

 

CÔTE D’IVOIRE :

Ouattara n’a pas encore dit son dernier mot

 

La Côte d’ivoire, voisine de la Guinée, désignera également son prochain président de la République en octobre 2020. Hormis le fait qu’ils soient voisins, la situation des deux Etats présente également des similitudes sur le plan électoral. En effet, le président Alassane Dramane Ouattara est quasiment dans la même situation que son homologue guinéen. Arrivé au pouvoir en 2010 dans des conditions électorales rocambolesques et réélu en 2015, ADO n’a pas encore dit son dernier mot pour 2020. En effet, si la nouvelle Constitution qu’il a promulguée le 8 novembre 2016 limite désormais le nombre de mandats présidentiels à deux, aucune disposition n’empêche le président en exercice de se présenter pour l’élection présidentielle à venir, quand bien même il a déjà effectué deux mandats.

A-t-Il fait exprès de laisser cette brèche ? Tout porte à croire que oui car le silence de la nouvelle Constitution sur le sort des deux mandats déjà réalisés par le Président est sujet à interprétation. Cependant cela a permis au président de cacher ses intentions et de maintenir le suspense jusqu’au bout. A l’heure où les grandes manœuvres ont déjà commencé au sein de l’opposition pour l’alternance avec notamment le retour de Laurent Gbagbo, acquitté par la CPI après huit années de détention suite à la crise post-électorale de 2010, ADO ne semble pas être pressé de dévoiler l’identité de son dauphin. Les supputations vont bon train dans ce sens entre notamment l’actuel Premier ministre Amadou Gon Coulibaly et le ministre de la défense Ahmed Bakayoko. Toutefois, l’effritement de la majorité présidentielle depuis la réélection du président en 2015, avec notamment le retrait du PDCI-RDA d’Henri Konan-Bédié et la dissidence de Guillaume Soro, devenu d’ailleurs persona non grata en Côte d’Ivoire, ne favorise pas la sérénité au sein du clan présidentiel. Ces facteurs ont-ils emmener ADO à céder à la tentation du troisième mandat ? Tout compte fait, les ivoiriens veulent voter dans la paix !

 

NIGER :

Exit Issoufou, Amadou espère un miracle!

 

Au  Niger, l’élection présidentielle sera l’intermède des fêtes d’année. Elle se tiendra le 27 décembre 2020 avec comme enjeu la succession du président Mohamadou Issoufou. Ce dernier, empêché par l’article 47 de la Constitution de 2010 de se représenter après ses deux mandats, a promis qu’il ne cèdera pas à la tentation du troisième mandat. Si cette sortie a pour intérêt de clarifier la position du président nigérien, contrairement à ses homologues ivoirien et guinéen, doit-elle rassurer les candidats à sa succession dans son camp et dans l’opposition ?

Le parti présidentiel par la voix de son secrétaire général a comparé récemment l’éventuel troisième mandat du président Issoufou à un « coup d’Etat », ce qui constitue une garantie forte contre une volte-face du Président. Si la succession du président nigérien reste alors ouverte, l’on peut se demander si le moment est enfin venu pour son grand rival Hama Amadou ? Ex-allié de circonstance du président, devenu son plus grand rival, Hama Amadou est un homme politique nigérien très controversé qui lorgne depuis pas mal de temps le fauteuil présidentiel. Battu dans des conditions confuses en 2015 par Issoufou, celui qui a battu le record de longévité d’un Premier ministre dans le nouveau constitutionnalisme africain (2000-2007), désigné par son parti comme candidat à la présidentielle de 2020, n’a pas son destin entre ses mains. En effet, condamné par contumace à une peine de prison dans une affaire de trafic d’enfants, et inéligible suite à cette condamnation conformément au code électoral nigérien, il est rentré d’exil fin 2019 et reste dans l’attente d’une grâce présidentielle destinée à décrisper le climat politique. Vers une nouvelle alliance de circonstance avec le chef de l’Etat ? Wait and see !

 

GHANA :

Un troisième round pour départager Akuffo-Addo et Mahama : confirmation ou revanche?

 

Depuis que le vent du renouveau démocratique a soufflé sur le Ghana au début des années quatre-vingt-dix, ce pays est devenu le champion de l’alternance en Afrique. Rawlings, Kufuor, Atta-Mils, Mahama et maintenant Akuffo-Addo ont accédé tour à tour au pouvoir dans ce pays anglophone de l’Afrique de l’Ouest par la voie des urnes.

Après deux échecs en 2008 et 2012, Nana Akuffo-Addo est arrivé au pouvoir en 2016 en ayant eu le mérite de battre le président sortant John Dramani Mahama (situation rare en Afrique il faut le souligner). Toutefois, à l’heure où les manœuvres vont bon train pour la remise en jeu du mandat présidentiel, l’ex-président espère un macth retour avec son bourreau de 2016. En réalité, il s’agira d’un match d’appui puisque Mahama s’était imposé en 2012 devant Akuffo-Addo pour accéder à la présidence. Un match programmé en novembre 2020 qui s’annonce déjà très passionnant.

 

TANZANIE :

Maguiflui doit-il s’inquiéter ?

 

Choisi pour représenter le parti présidentiel lors des élections de 2015 , John Maguflui a réussi a conserver le pouvoir acquis en 2005 par Jakaya Kikwete, qui n’a plus se

représenter après ses deux mandats constitutionnels. Toutefois, dès les premières heures de son mandat, des accusations de l’opposition relayées par des organisations internationales de défense des droits de l’homme ont fait état des dérives autoritaires de son régime. A en croire les observateurs, ces dérives répétées ont eu pour conséquence de faire émerger un front uni de l’opposition, qui au départ est destiné à protéger la démocratie, mais qui pourra se transformer très prochainement en une coalition électorale redoutable pour la présidentielle d’octobre 2020.  

 

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